Moyen Âge. Les grands châteaux ducaux

Moyen Âge. Les grands châteaux ducaux

Pour défendre leur territoire et pour affirmer leur prestige, les ducs de Bretagne ont construit de nombreux châteaux forts, notamment à l'est du duché et sur les côtes. Ces imposantes forteresses continuent de marquer le paysage breton.

Publié le 13/10/2008
Modifié le 16/05/2018
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Les premières fortifications apparaissent dès la Protohistoire dans la péninsule armoricaine. Elles se généralisent entre le III e et le II e siècle avant J.-C., période de tensions dans la société celtique qui voit l'apparition de places fortes comme le camp d'Artus à Huelgoat (29) ou l'oppidum de Paule (22). Après la conquête romaine et la paix qui s'installe au début de l'Empire romain, de nouvelles fortifications sont édifiées pour défendre les villes et le littoral à la fin du III e siècle après J.-C. Ainsi, les cités de Rennes, Vannes et Nantes se dotent de remparts de pierre gallo-romains dont certains tronçons sont toujours visibles. À l'extrémité ouest de la péninsule, un premier château est édifié à Brest.

Des fortifications de terre et de bois

Ces ouvrages sont réutilisés au haut Moyen Âge, mais de nouvelles forteresses sont aussi construites, en terre et en bois. Au début du IX e siècle, le chroniqueur franc Ernold Le Noir dépeint ainsi la résidence du roi breton Morvan lez Breizh : « Il est un lieu défendu par des retranchements, des fossés, des marécages, souvent empli de guerriers de toute sorte. Au-dedans de cette enceinte s'élève une belle demeure enveloppée dans les replis du fleuve ». Après l'an mille, les mottes féodales se généralisent. Il s'agit d'un dôme de terre, généralement artificiel, sur lequel est édifiée une tour de bois. L'ensemble peut être entouré d'un rempart de terre et de bois. L'une de ces mottes, à Dinan, est représentée sur la célèbre tapisserie de Bayeux, dans la partie présentant la guerre entre Guillaume le Conquérant au duc de Bretagne précédant la conquête de l'Angleterre. Les ducs de Bretagne possédaient plusieurs mottes, dont une, fort importante, édifiée en forêt de Beffou (22) où elle est toujours visible.

Premiers châteaux forts de pierre

À partir du XII e siècle, la construction en pierre se développe, même s'il en reste peu de vestiges aujourd'hui. La fonction militaire de ces châteaux est bien entendue très importante. Ils permettent de contrôler les territoires alentours et de fixer les armées ennemies. Mais ils sont aussi des lieux de pouvoir et de résidence pour des ducs bretons qui ne cessent de se déplacer avec leur cour entre différents lieux. Les logis, avec les appartements du seigneur et de ses serviteurs, ne cessent de se développer en volume à partir du XIII e siècle. Ils gagnent aussi en ostentation. Au début du XIII e siècle, avec les ducs de Bretagne issus de la famille de Dreux, les forteresses ducales connaissent d'ailleurs un nouvel essor. Ainsi, Nantes et son château voient leurs fortifications améliorées. Au nord-est, Pierre de Dreux fait bâtir le puissant château et donjon de Saint-Aubin du Cormier pour surveiller la frontière avec la Mayenne et la Normandie. Dans la presqu'île de Rhuys, Pierre de Dreux acquiert aussi la châtellenie de Suscinio. Outre le climat privilégié de la presqu'île de Rhuys, les ducs de Bretagne ont en effet été séduits par les possibilités qu'offrait le lieu pour la chasse, l'un des loisirs principaux des grands féodaux de l'époque. L'actuel château est toujours entouré de marais et de forêts. Au Moyen Âge, un vaste mur de pierre entourait plusieurs enclos pour servir de réserve de gibier. C'est sans doute Pierre Mauclerc qui a acquis le château vers 1218. Ses successeurs l'ont agrandi et embelli. C'est à Jean III que l'on doit les magnifiques sols en carreaux de terre cuite, retrouvés lors de fouille en 1975 et qu'on peut désormais admirer dans les parties restaurées. Ravagé pendant la guerre de Succession, Suscinio devient ensuite l'une des résidences favorites des ducs de la maison de Monfort. Jean V entreprend la construction d'un deuxième logis. Puissante forteresse, le château est également un lieu de résidence et de plaisir, en témoigne l'importance des appartements ducaux, des salles de réception ou de cuisine. Une véritable cour princière évolue en effet autour des ducs de Bretagne et les hôtes sont logés au château.

Les constructions de la fin du XV e siècle

Quelles soient ducales ou appartenant à d'autres féodaux, ces forteresses vont être mises à rude épreuve durant la guerre de Succession de Bretagne entre 1341 et 1364. De nombreux châteaux sont pris d'assaut et sévèrement endommagés. Ils sont ensuite consolidés ou reconstruits. Après leur victoire, puis la fin de leur querelle avec les Penthièvre en 1420, les ducs de Bretagne de la maison de Montfort contrôlent un grand nombre de forteresses en Bretagne. Une bonne partie se trouve à l'est, sur la frontière avec le royaume de France : Fougères, Vitré, Saint-Aubin-du-Cormier, Châteaubriant, Ingrandes, Clisson... forment une véritable ceinture de places fortes défendant les marches de Bretagne. L'autre frontière, les côtes, n'est pas non plus négligée. Des fortifications ducales sont construites ou améliorées sur le littoral, comme la Tour Solidor qui contrôle l'entrée de la Rance à Saint-Malo ou Brest, surnommé « le château le plus fort du monde » par le chroniqueur Froissart. D'autres châteaux sont construits dans la seconde moitié du XV e siècle. Comme à Guingamp où est édifiée une enceinte rectangulaire flanquée de quatre tours rondes. Cette nouvelle construction a pris en compte les progrès de l'artillerie qui ne cesse de s'améliorer à cette période. Alors que les premiers canons employés à la fin du XIV e avaient peu de portée et ne tiraient que des boulets de pierre, peu efficaces, au siècle suivant, les poudres s'améliorent et l'utilisation de boulets en métal, plus percutants, se généralise. L'architecture militaire s'y adapte avec des bases de remparts et de tours plus compactes, à même de résister aux projectiles. Ces efforts de fortifications seront vains lorsque le roi de France décide d'envahir la Bretagne en 1487. Fougères, Vitré ou Guingamp sont ainsi prises d'assaut. Après la défaite bretonne à la bataille de Saint-Aubin-du-Cormier, le vieux donjon de Pierre Mauclerc tombe aux mains des troupes françaises. Pour le symbole, elle en rase la moitié, ne laissant debout que celle qui fait face au royaume de France. Mais la plupart de ces forteresses ont survécu aux aléas du temps et comptent toujours parmi les fleurons du patrimoine breton.

Le château de Nantes

En 937, le premier duc de l'histoire de Bretagne, Alain Barbetorte, chasse les Vikings de Nantes et entreprend de relever la cité. Il loge alors dans « la tour principale », probablement l'une des tours de l'époque gallo-romaine, aménagée en donjon. Un autre château, sans doute une motte, sera édifiée au Bouffay. Au XI e siècle, Nantes tombe définitivement dans l'orbite des ducs de Bretagne qui vont y séjourner et en faire l'une des principales villes de leur principauté. En 1207, un nouveau château est bâti dont la construction se poursuit sous Pierre Mauclerc. Endommagé au XIV e siècle, il est reconstruit par le duc Jean IV. Mais c'est à partir de 1472 que le château de Nantes prend son aspect actuel. Le duc François II entreprend de se construire un véritable palais qui sera aussi le siège d'une partie de son administration. Si les imposantes tours d'enceinte rappellent qu'il s'agit d'un château-fort médiéval, les logis intérieurs, en tuffeau blanc de Loire, annoncent déjà la Renaissance. Récemment restauré et transformé en musée, le château de Nantes est l'un des principaux témoins de la puissance et de la richesse des ducs de Bretagne.

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